« Démasquer les consciences »
Le théâtre d’Ödön von Horváth

par la compagnie A2R
dirigé par François Rancillac, metteur en scène
assisté par Christine Guênon, comédienne

du 4 au 29 mars 2024 (140 heures) à Paris

Renseignements : www.francoisrancillac.com

Inscriptions (avant le 3 février) auprès de Fanny Laurent a2r.formations@gmail.com

Dossier du Stage

Ödön von Horváth (1901 – 1938), Hongrois de langue allemande, voyageur impénitent, esprit libre affranchi de tout parti, a écrit à travers une quinzaine de pièces (dont Légendes de la forêt viennoise, Casimir et Caroline, Don Juan revient de guerre, Figaro divorce, Foi Amour Espérance, etc.) et quelques romans une chronique saisissante de lucidité de cette Allemagne terrassée par la guerre et les crises politiques et économiques. Avec un humour au scalpel, sa « comédie humaine » décrit les gesticulations dérisoires d’une petite-bourgeoisie qui a perdu tous repères et s’imagine retrouver un peu de dignité dans les vociférations nationalistes, réactionnaires et racistes de la « bête immonde » en marche. Sans réaliser qu’elle la mènera à sa propre déshumanisation…

Croisant la comédie populaire et la tragédie, l’expressionnisme et le cabaret, s’inventant une langue rêche, trouée de non-dits et de ruptures soudaines, où la poésie fraye avec le trivial, le sourire avec le rictus, jouant des niveaux de langage et des discours prémâchés, Horváth prête vie à une floppée de personnages hauts en couleurs, profondément perdus derrière leur apparente fatuité et leurs masques de vertu. Seules quelques femmes se battent encore pour sauver leur liberté (de vivre, de penser) – bien vite rattrapées par la violence du patriarcat et la misère ambiante… Si le constat est terrible, l’humour est ici permanent et l’humanisme de Horváth indéfectible : à l’opposé d’un Brecht, son contemporain, il ne souhaite pas la transformation de la société par l’imposition d’un système idéologique – et son théâtre est ni un manifeste ni un objet d’édification : il raconte au plus près mais sans jamais la juger la complexité du monde et des humains dans toutes leurs contradictions, laissant libre à chacun.e d’y déceler des lignes de fuite, d’espoir pour éviter l’inévitable.

En ces temps où les populismes identitaristes et xénophobes envahissent à nouveau notre espace public, le théâtre et le rire d’Horváth peuvent sans doute nous aider nous aussi à « démasquer les consciences » (pour reprendre sa belle expression). Et à redresser l’échine ?

François Rancillac